Tu fixes le cadran de ta montre qui affiches 14h45, t’indiquant que t’es arrivé 15 minutes trop tôt devant la salle, actuellement fermé. A croire que t’es pressé, mais il faut avouer que t’aimes bien ça, le théâtre. Parce que c’est le seul endroit où être soit même est proscrit, ou tu peux incarner qui tu souhaites même le pire être qui soit. Et c’est une de tes plus grandes passions dans la vie, te faire passer pour quelqu’un d’autre.

T’as d’ailleurs souvent utilisé ton apprentissage theatrale dans la vie de tous les jours, que ça soit un rôle incarné, ou juste des phrases qui pourrait attirer des inconnus dans ta chambre.


Mais la tu te retrouves comme un imbécile à devoir attendre que le ou la professeur arrive, alors qu’aucun autre élève n’est visiblement présent.

C’est planté devant la porte que tu remarques un grand dadais (enfin grand, façon de parler vu qu’il fait ta taille, mais genre vraiment) se diriger vers toi tout guiret pour agiter le trousseau de clé sous ton nez.

-  Heyyo ! Tu veux entrer ? T'es qui toi ? Je t'ai jamais vu ici ! T'es nouveau ?! C'est SUPER ! C'est quoi ton nom à toi ?!

Il parle un peu trop à ton goût, mais comme il a les clés de la salle tu supposes que c’est le professeur de théâtre alors t’oses rien dire, même s’il parait assez jeune pour ça.  Ça ne te surprends pas tant que ça au final, un professeur de théâtre à l’apparence juvénile, donc tu lui réponds avec tout le respect que tu utilises pour t’adresser à lui.

- Bonjour, je m’appelle Leópold Sörenson, je suis effectivement tout nouveau à Blenheim même si je rentre en sixième année. J’étais assez impatient du coup je suis arrivé en avance, mais j’imagine que vos autres élèves ne devraient pas tarder.

T’espères que ça va bien se passer, parce que le professeur à l’air d’étre un sacré excentrique. A moins que cela soit juste la fatigue apparente qui le fait agir comme ça.

- Bah tient, vu que t'es nouveau, on va en profiter que les autres ne soient pas encore là ! Un petit test de rien du tout.

Tu hausses les épaules, t’aurais préféré éviter le test solo direct à ton arrivé mais après tout, pourquoi pas. T’avais qu’a pas arriver autant en avance, puis ça t’échauffera un peu. Tu poses ton sac de cours dans un coin de la pièce, retire ta veste kaki pour être un peu plus à l’aise, puis rejoint le professeur sur l’estrade, attendant ses instructions. Qu’il ne tarde pas à te donner.
Autant tu comprends pour les trois hurlements, autant l’imitation des animaux c’est bizarre, surtout ces bêtes la… Mais bon, il doit savoir ce qu’il fait.

Tu te mets en position, bien droit et sur tes appuis, te raclant la voix. Puis une fois que tu te sens prêt, tu commences l’exercice, d’abord la peur, puis le désespoir. Et vient l’excitation.


- Aaaaaaaaaaaaaaaa…

- Tiens Cody tu es déjà là, qu’est-ce que vous faites ? Oh mais c’est un nouvel élève, bienvenu dans mon cours de théâtre.

Tu te tournes vers l’adulte qui vient d’entrer, puis vers ce Cody. Ton regard fait ainsi l’aller-retour jusqu’à ce que tu comprennes enfin. Tu lances un regard des plus assassins envers l’imposteur.

- …  

T’essayes de rester le plus imperméable possible, bien que tes yeux envoient des éclairs au mec qui se marre.
Tu ne comprends pas comment t’as pu te faire avoir quoi ça. Enfin si, y a pleins de raisons enfaite qui explique le quiproquo, la principale étant que t’es tout nouveau à Blenheim, mais….

- Donc euh... Je suis Cody Lyuben Arwen ! Pas du tout ton prof de théâtre et je ne suis vraiment pas désolé ! C'était vraiment trop marrant avoue !

Et tu te rapproches de lui sans un mot, le regard sévère, et tu lèves une main vers lui comme pour signe que t’allais le frapper. Main qui se pose sur l’épaule de Cody, ta tête qui se baisse pour montrer ton abattement.

- Ok Cody, bravo t’es doué pour la comédie, tu m’as bien eu.

Et tu te diriges en grommelant un « je suis trop bête » pour aller te présenter au vrai professeur, qui à l’air un peu perdu par la situation enfaite.

Bon allez calme toi Leo, c’était juste une blague, et il t’as bien eu. Et quelque part tu respect son talent, c’est assez rare les gens qui te trompe de la sorte. Mais bref.
Les autres arrivent, et tu examines chaque nouvelles tête. Dont aucune que tu connais. Léger soupir, t’espérais retrouver des gens rencontrés lors de tes folles soirées estivales, mais personne. Tant pis.

En attendant faut se mettre en binome, et évidemment que ta première pensée c’est de rejoindre ce Cody. Mais bon, la fierté tout ça tout ça . Alors tu te diriges vers une nana inconnu, quand tu sens un poids dans le dos.

- Hey hey HEY ! Léooooopold ! On se met à deux dit ? Ouais on se met a deux ! C'est mon cadeau de pardon

Cadeau de pardon, genre il s’en veut ? Mais allez pourquoi pas, il est bien plus énergique que toi, ça peut pas être mauvais pour un duo.

- On va devenir SUPER pote, tu verras !

Non ?

- D’accord on peut se mettre ensemble, mais calme toi un peu.

T’aimes pas trop attirer l’attention, et la s’est un peu raté.
Tu sens déjà que ça va être fatiguant, un gars pareil en compagnon.

La prof vous donne chacun une pièce différente, nous demandant de lire un passage de la manière la plus neutre au départ.

Ca semble peine perdu pour qu’il se calme, et t’as pas envie de perdre plus ton énergie pour ça. Tu regrettes d’avoir accepté, mais tant pis. Au moins il a l’air d’avoir du talent en tant que comédien vu comme il m’a eu tout récemment, donc c’est plutôt un avantage dans le cas présent.
Tu lis rapidement le texte. Ton partenaire propose de prendre le rôle de Laertes, t’es un peu surpris parce que tu t’attendais à ce qu’il prenne le rôle où il est le plus susceptible de « briller », mais soit.

- Pas de problème, je jouerais Hamlet.

C’est censé être « l’échauffement » mais devoir lire un texte sans ne le ponctuer ni mettre d’émotion reste compliqué. Tu jettes un œil à Cody qui semble soudainement apaisé. Ça te plait, bizarrement, ce changement de comportement, il prend le théâtre au sérieux.
Vous récitez votre texte de façon monotone, ça permet de l’assimiler un peu, puis le professeur vous demande de le jouer avec dans des sentiments définis : colère, peur, joie…

Léger chuchotement à Cody comme pour lui indiquer que tu lui pardonnais la blague de tout à l’heure :

- Au moins je suis exercé grâce à toi maintenant.

Et la séance se finit, après d’autres exercices réalisés. T’as hâte de rentrer chez toi maintenant.

Sac en bandoulière sur l’épaules, tu t’apprêtes à quitter la salle après un vague salut de la main à tes camarades de théâtre quand l’appareil électronique s’agite devant toi. Lui filer ton numero de portable ? Tu sens d’avances que c’est une mauvaise idée, qu’il va te spammer de sms alors que t’es pas trop du genre à y répondre, voir que t’oublies la majorité du temps - du genre à préférer écrire sur papier, ouais c’est vieux jeux tu sais mais tu t’en fiches.

Puis si il est si doué qu’il le prétend pour trouver un numéro, qu’il se débrouille - et t’es curieux de voir ça, pour être honnête. Et dans un coin de ta tête tu pense même que ça pourrait te servir d’avoir une connaissance bien renseignés.

- Débrouille toi pour mon numéro, si t’en est vraiment capable.

Ça sonne comme un défi, s’en est un. T’espères que ça va le freiner. Ou alors ça sera plus intéressant que tu veux bien l’admettre, peut être.

Puis vient son invitation à sa soirée pyjama, qui te rends bouche bée avant que de te faire éclater de rire - un rire honnête qui te surprends toi même. Une soirée pyjama ? Il a quel âge le garçon ? Rien que pour la curiosité de la proposition, t’es obligé d’accepter, même si tu sens la soirée barbante. Et t’as pas envie d’enchainer les refus.

- Ok ok ! Va pour la soirée pyjama, on fera comme tu dis.


Tu récupères le numéro du dortoir du gars et quitte la salle, te dirigeant vers ton prochain cours.
Tu sais pas dans quoi tu t’embarques ce soir, tu vas peut être le regretter, mais tu espères être surpris.