Il fallait, évidemment, que ça tombe sur elle. Tous les jours, une charge de travail supplémentaire dont personne ne veut. Mais Mary les accepte avec un sourire. Parce qu’elle ne dit pas non. Et aujourd’hui, c’est plutôt sérieux ; il faudra faire preuve de diligence et de rigueur pour former la petite stagiaire. Mary crève d’envie de la prendre sous son aile et elle ne la connaît même pas encore. C’est d’instinct. Et cet instinct se réaffirme en voyant la stagiaire. Cunégonde. Mary sourcille à peine en voyant son prénom, pourtant peu commun.

“Bonjour ! Tu dois être Cunégonde Gainsborough ? Suis-moi vite, on n’a pas de temps à perdre.” indique Mary à la demoiselle, qui n’a vraiment pas une tête de Cunégonde. Elle s’élance dans les couloirs, saluant ses collègues au passage, puis arrive devant le vestiaire.

“Allez, file mettre ta blouse et ta charlotte. N’oublie pas les chaussons aussi. On a beaucoup de travail ce matin !”

La pauvre, elle allait en voir de toutes les couleurs. Mary était investie et souhaitait former cette demoiselle au mieux ; elle espérait que Cunégonde était motivée, au moins autant qu’elle.

L’hésitation de Cunégonde est adorable. Mary ne peut que se rappeler ses premiers stages en la voyant aussi peu sûre d’elle. Ça viendra avec le temps et l’expérience, cependant, aucun doute là dessus.

“Super, la blouse a l’air d’être à ta taille. Crois-moi, c’est compliqué quelques fois. On ne connaît pas toujours la corpulence de nos stagiaires.” commente-t-elle en souriant à Cunégonde avant de repartir vers les couloirs.

“Le programme ?”

Mary hausse les sourcils, étonnée. Elle s’exprime de manière amusante, cette petite.

“On va vers les services de gériatrie d’abord. Aujourd’hui, tu vas observer majoritairement.”

C’est plus rassurant que d’être lancé directement dans un milieu qu’on ne connaît qu’à travers les livres. Mary se voulait rassurante ; la dernière chose qu’elle souhaitait, c’était intimider la demoiselle.

“Alors dis-moi, tu as fait tes études où ?”

C’est qu’elle avait l’air jeune, tout de même.

Mary fronce les sourcils. C’était la première fois qu’on leur envoyait une stagiaire aussi peu au courant du jargon médical. Tout le monde sait ce qu’est la gériatrie, non ? Un peu inquiète, elle ralentit le pas.

“Tu n’as jamais vu ça en cours ? C’est bizarre.”

Elle en profite pour analyser la petite, maintenant qu’elles marchent au même niveau. Elle fait vraiment jeune pour être stagiaire, c’est fou… Et elle n’avait pas vraiment l’air dans son assiette. Un peu perdue, un peu déconcertée. Un peu mal en point.

“Tu es sûre que tu es prête pour le stage ? On peut voir pour une autre date si tu veux ?”

Techniquement, on ne peut pas. Mais Mary se voyait mal former à 100% une étudiante qui n’avait même pas les bases. Alarmée, Mary observa la demoiselle. Qui semblait plus perdue que jamais, au milieu du club du troisième âge.

… Quoi ?

Mary écarquille les yeux, fronce les sourcils, voit flou, tout ça chacun son tour. Pour finir, un air absent s’affiche sur son visage.

“Pardon ?”

C’était une blague ? Une caméra cachée ? Le staff se cachait quelque part et des millions de téléspectateurs étaient en train de se moquer d’elle en direct, non ? Elle sentit le rouge lui monter aux joues.

“Tu veux dire que je te balade depuis tout à l’heure...et que tu es une malade ?”

Quelle honte. Et ça se dit infirmière. Elle aurait dû le remarquer, que son oeil n’allait pas bien ! Que c’était malaisant pour elle.

“Non ! Tu ne peux pas rentrer ! Je vais examiner ton œil. Enfin euh…”

Mary ne sait pas où se mettre. Après avoir fait tous ces allers-retours…