Alors que la plupart des élèves quittaient le stade, Sylvester s’essuya son visage couvert de sueur avec une serviette violette. Le deuxième année n’avait pas l’intention de partir tout de suite même si les activités du club s’étaient terminées. Après tout, il avait encore un peu de temps pour continuer le sport. Et il ne se sentait aucunement épuisé malgré l’entraînement intense qu’il venait d’avoir. En même temps, il en fallait beaucoup pour fatiguer le cadet Seo. Il fit un signe joyeux de la main à ses potes, riant et haussant les épaules au passage quand ils le traitèrent de fou. Pas sa faute si l’entraînement d’athlétisme ne suffisait pas à dépenser toute son énergie.
Il attrapa sa bouteille d’eau posée sur un banc et but quelques gorgées pour s’hydrater. Ce serait bête de mourir de déshydrations, surtout avec cette chaleur ! Même s’il supportait mieux que le commun des mortels grâce à ses super gênes nordiques. Après s’être rafraîchi, le jeune homme se dirigea de nouveau vers la piste pour courir encore un peu. Un grand sourire aux lèvres, le regard pétillant, il se mit sur la ligne de départ et démarra au quart de court près quelques secondes d’attente. Le métisse était sacrément rapide quand il était en forme, et aujourd’hui il l’était assurément. La nuit avait été longue pour changer, ses devoirs ne lui avaient pas pris trop de temps et il avait pu se coucher tôt. Cela faisait du bien, même il ne se plaignait jamais de toute manière. C’était lui qui avait accepté d’aller à Blenheim, après une conversation avec son père et ses aînés bien sûr, donc c’était à lui d’assumer.
Même si personne ne lui mettait vraiment la pression, à part lui-même et le système de l’établissement. Il n’avait aucune envie d’être le seul membre de sa fratrie à être renvoyé, merci bien. Enfin, pour l’instant il ne pensait à rien de tout ça. Courir lui permettait de se vider la tête, aussi bien que le kendo et le karaté. Le sport il n’y avait que ça de vrai ! Mais alors qu’il finissait son premier tour de stade, il aperçut une silhouette non loin qui commençait également à courir. Sylvester garda un œil sur elle, plus pour être sûr de ne pas être dépassé qu’autre chose. Il avait le sens de la compétition et détestait perdre, même d’une façon aussi peu importante. Mais en réalité, cela ne risquait pas d’arriver...
Le métisse asiatique nordique ralentit la cadence et finit par s’arrêter, quelque peu perplexe. Ses yeux bleu marine posés sur le garçon qui se trouvait au sol après avoir trébuché, il approcha lentement pour s’assurer qu’il allait bien. Mais quand même... Se casser la figure de cette manière relevait presque de l’art. Il ne savait pas courir ou quoi ? Je veux dire, tout le monde sait courir ! Sans avoir besoin d’être forcément un expert, après tout il ne se rappelait pas de ce type dans le club d’athlétisme et il avait une bonne mémoire des têtes.
Après tout, le deuxième année adorait se faire de nouveaux amis et donc il se passait peu de temps avant qu’il ne sympathise avec tout le monde lors d’une nouvelle activité. Hors, il en faisait depuis sa première année. Donc ouais, il était sûr que ce mec n’était pas du club, et pourtant sa tête lui disait vaguement quelque chose. En tout cas, il fallait être vraiment doué en son genre pour tomber comme ça...
- Hé, rien de cassé ?
Il s’arrêta juste devant lui et lui tendit la main, un mélange d’inquiétude et d’étonnement sur le visage. Non, vraiment, il ne connaissait personne d’aussi maladroit... Hein, lui ? Certes, il se prenait des ballons dès qu’il passait à un mètre d’eux, mais ce n’était pas du tout pareil ! ... Je dois dire ça au vase d’anniversaire de mariage des parents ? Ouais, bon, d’accord, il était peut-être un peu maladroit. Mais lui savait courir au moins ! Enfin, il ne fit pas de remarque, il avait quand même un peu de tact...
- T’as marché sur ton lacet pour tomber comme ça ou quoi ?
« où la situation est plus grave qu'elle en a l'air »
♚
Tu y étais Luna. Enfin. Après une vie entière à espérer. Après toute une année de frustration. Tu y étais. Tu étais libre Luna, et tes pas avaient put te guider jusque là sans craindre que ne surgisse à tout moment ta mère. Elle était retournée en Islande. Et toi Luna, tu étais là.
Dans le complexe sportif. Sur le stade.
Combien de temps en avais-tu rêvé au juste, lorsque tu étais piégé dans ta prison d’or et de glace ? Longtemps. Tu avais presque l’impression d’avoir attendu cet instant toute ta vie. Alors penser que tu allais pouvoir venir ici autant de fois que tu le voulais au cours de l’année.
Tu en sautillais sur place.
Alors tu te mis à courir. Tu avais déjà couru avant bien sûr. Dans la neige et dans la forêt, quand tes parents ne regardaient pas. Quand tes parents ne savaient pas que tu avais quitté la maison sans autorisation.
Mais cette course-là avait un autre goût. Un goût de nouveau, un goût d’espoir, un goût de rêve. C’était du béton sous tes pieds, Luna. Ca ferait plus mal si tu tombais. Ca serait plus dangereux. Elle avait peut-être ce goût là aussi, la course. Et ça se confirma quelques mètres plus loin, quand ton inattention te valu une jolie chute.
Douloureuse. Tu manquais d’attention Luna. Tu le savais. Maladie et excitation ne faisaient jamais un bon mélange chez toi. Et la douleur dans ton poignet, qui te fis presque monter les larmes aux yeux, parce que bon sang ça faisait putain de mal –ta mère n’approuverai pas du tout ce langage. ton père non plus-, t’indiqua que tu avais merdé.
Et la voix qui, un instant plus tard, te demanda si tu n’avais rien de cassé, avait quelque chose de particulièrement ironique en cet instant. En relevant les yeux, tu tombais sur. Ah, zut. C’était quoi son nom ? Tu le connaissais. Il était pote avec Percy. Mais comme il n’était pas Percy, tu n’avais pas retenu son nom. Pas totalement. Ca ne t’arrangerait pas, présentement. Une main fut tendu vers toi Luna, et dans la mesure où tu étais certaine d’avoir au moins un bras H.S. pour le moment, tu t’en saisi immédiatement.
Une fois debout, tu eus droit à une autre question des plus magnifiques, et tu méditas un instant sur la réponse. Mais non. Tu n’étais pas maladroite Luna. Juste un peu distraite à cause de l’euphorie.
Le sentiment. Pas le pokémon.
« J’ai juste pas fait attention. Mais je crois que je me suis fracturé le poignet. »
Ca t’étais arrivé tellement de fois que tu connaissais bien la sensation. Ca faisait mal, mais ça allait encore. Ca n’avait pas cet angle bizarre de quand ça s’est cassé. Par contre, ta voix totalement pas du tout paniqué était presque hors contexte.
Sylvester était partagé entre la perplexité et l’inquiétude. Il ne tombait jamais quand il courrait, probablement parce que c’était une seconde nature de bouger. Il était constamment en mouvement depuis son plus jeune âge et maîtrisait parfaitement son corps – et ses pieds par la même occasion. Mais visiblement, ce n’était pas le cas de tout le monde et même s’il le comprenait, cela le rendait quand même perplexe dès qu’il rencontrait quelqu’un qui n’aimait pas le sport ou qui chutait facilement. Quant à l’inquiétude, elle était légitime vu la chute. Il était trop gentil pour ne pas se soucier des autres en toutes circonstances, surtout dans celles-ci. Tomber ça faisait mal ! Logique implacable, n’est-ce pas ?
En attendant que l’autre attrape sa main tendue et lui réponde, le métisse se creusa la tête pour savoir où il l’avait déjà vu. Mais impossible de s’en souvenir. Frustré, il secoua légèrement la tête, sans se soucier qu’on le prenne pour un fou. Il sentit une prise sur sa main et hissa l’autre garçon – achetez-lui des lunettes enfin – sur ses pieds. Ensuite, l’Outrageous lui adressa un grand sourire et lui flanqua une légère accolade dans le dos, ne voulant pas le faire retomber quand même. Il avait l’air tout fragile cet étudiant et Sylvester ne savait pas trop comment s’y prendre avec les mecs – et les filles, ne soyons pas sexistes – fragiles. Il était un peu trop agité pour les fréquenter, il avait toujours peur de les casser avec son exubérance, son agitation constante.
Mais sa peur ne l’envahissait pas assez pour ne pas vérifier que ses camarades allaient bien après ce genre d’incidents. Son côté grand-frère ressortait toujours dans ce genre de situations, il aurait fait la même chose avec Mikaela et Astrid ses cadets, ou même avec ses jumelles. Quitte à se prendre des coups de la part de certains... Mais heureusement cette fois il était peu probable qu’il s’en prenne un. Enfin, revenons à nos moutons si vous le voulez bien. Après avoir donné son accolade, il posa son regard sur le bras qui n’avait pas été utilisé par le deuxième élève et le trouva un peu gonflé au niveau du poignet, ce qui n’était sans doute pas bon signe. Ce qui se fit confirmer par son propriétaire et Sylvester écarquilla les yeux, quelque peu paniqué.
- Fracturé ?! Mais c’est horrible ! Faut que t’aille à l’infirmerie tout de suite !
Et il commença à le pousser en avant, complètement paniqué. Il ne savait pas quoi faire dans ce genre de situations, lui ! Il n’avait jamais suivi de cours de secourisme ! Peut-être devrait-il se renseigner pour en suivre ! Enfin non, c’était beaucoup trop angoissant, beaucoup trop de responsabilités ! Mais en même temps c’était terriblement méga important ! Et ouais, il ne gérait pas très bien le stress le Sylv’. Pris d’une idée soudaine, il souleva délicatement et sans prévenir le blessé pour le porter comme une princesse, les joues rouges. C’était ridicule, mais ils iraient plus vite comme ça !
- Désolé, mec ! Mais on ira plus vite comme ça !
Et il se mit à courir avec son fardeau dans les bras, en veillant à ne pas trop le secouer quand même, sans jamais se rendre compte que porter en princesse un mec était assez ridicule. Et encore moins que le mec était en réalité une fille !
- Au fait ! Comment tu t’appelles ? Moi, c’est Sylvester des Outrageous !
Et ouais, même les Outrageous pouvaient être de bons samaritains quand ils le voulaient. Sylvester était sans doute le plus bisounours d’entre eux, d’ailleurs, si on oubliait ses bagarres des plus fréquentes. D’ailleurs, aujourd’hui il avait deux pansements sur la tempe, preuves de son passage à l’infirmerie plus tôt dans la journée. Comme l’équipe médicale devait être blasée de lui à force... Tout comme les professeurs et peut-être même le directeur. Car impossible de ne pas connaître ce drôle de phénomène qu’était le fils cadet des Seo.
« où la situation est plus grave qu'elle en a l'air »
♚
Ton poignet était sans doute fracturé. Ca ne t’inquiétait pas plus que ça. C’était sans doute terrible à dire, mais pour toi Luna, c’était normal. Normal que ton corps parte en morceau au moindre choc. Ca ne t’effrayait pas, plus. Mais ça ne voulait pas pour autant dire que tu ne faisais pas attention à toi.
Un simple poteau électrique prit dans la tête pouvait te tuer, si tu allais un peu trop vite.
Cette fois-ci, pas de chance, tu avais trébuché et le reflexe naturel de ton corps avait été de projeter tes mains en avant. Il valait mieux ça qu’une collision frontale. Ce n’est pas une fracture que tu aurais alors eut. En revanche le gars que-tu-connaissais-mais-dont-tu-ne-te-rappelais-pas-le-nom ne le prenait pas aussi calmement que toi.
En fait, il paniquait carrément.
Avant que tu n’es pus rajouter quoique ce soit, tu étais poussée vers la sortie du stade. La direction ? L’infirmerie. Logique. Quoique l’infirmerie te renverrai sans doute à l’hôpital. Pour faire une radio puis poser un plâtre. C’était comme ça l’année dernière. C’était toujours comme ça. Alors vous vous dirigez d’un bon pas vers la sortie.
Pas assez bon cependant du point de vue de l’autre étudiant. Sans prévenir, te voilà propulsé dans ses bras tandis qu’il se met à courir à plus ou moins grande vitesse. Plutôt moins quand même. Et immédiatement, tu t’insurges malgré ce qu’il peut dire.
« Ce n’est pas une raison ! Pose-moi, je peux très bien marcher toute seule !! »
Et au passage tu appris son nom. Enfin, réappris. Pratique.
« Je m’appelle Luna. Est-ce que tu veux bien me lâcher maintenant ? Mes jambes vont très bien, je peux marcher ! »
En plus il n’y avait que Percy que tu autoriserais à te porter comme ça. Non mais.
Sylvester n’était sans doute pas très viril à paniquer ainsi, comme une fille diraient certains, mais oh il n’y était pour rien ! D’abord, il n’était pas sexiste alors ça ne le dérangeait pas de paniquer ainsi. Ensuite, c’était grave une personne en détresse ! Très grave ! Il n’était pas un expert en médecine alors il ne savait pas évaluer correctement la chose ! Peut-être qu’il était mourant ! Enfin, ce n’était sûrement pas le cas, mais on ne savait jamais hein !
Et même si elle n’était pas en train de mourir dans d’atroces souffrances ça devait quand même être douloureux ! Imaginez que son état s’aggrave simplement parce qu’il le laissait marcher tout seul ?! Il serait responsable ! Peut-être même un meurtrier !
Quoi, comment ça il sur-interprétait la chose ? Mais non voyons. Enfin, peut-être que si. Mais c’était Sylvester et il ne fallait pas chercher plus loin. Tout simplement. En tout cas, il se dirigeait vers la porte avec son précieux fardeau dans les bras quand le dit – et adorable – fardeau se mit à protester.
Sylvester lui jeta un regard un peu surpris. Euh, mais lui il aurait adoré se faire porter ! Il regrettait toujours le jour où son grand-frère avait déclaré qu’il était trop lourd pour ça, ça avait été vraiment un triste jour. Alors de quoi ce mec se plaignait ? Ce n’était pas juste, vraiment pas juste. En temps normal, il aurait cependant accepté que tout le monde n’était pas comme lui et l’aurait déposé sagement par terre en s’excusant tel un chevalier servant. Mais...
- Mais tu es blessé ! Ce ne serait pas convenable du tout !
Une évidence. Hum.
Le garçon s’arrêta net, secouant un peu son passager. Ou... sa passagère ? Minute papillon. Il avait bien entendu ? Vraiment bien entendu ?
- Luna... ?
Il baissa les yeux vers son fardeau et se sentit soudain très stupide. Oups. Le mec était une fille ? D’accord. Autant pour lui. Il la tint fermement d’un bras, l’appuyant un peu contre son torse et se frotta la nuque avec l’autre. Oups.
- Ah ouais, d’accord, euh...
Il la posa par terre sans discuter davantage, trop choqué et confus pour commencer à négocier. Son regard regardait maintenant au loin, comme s’il voulait avoir l’impression d’être seul au monde. Bizarre, le vent soufflait tout d’un coup. Un vent glacial.
- Excuse-moi. Euh... J’ai peut-être un peu paniqué...
Non sans blague. Le garçon risqua un coup d’œil vers la demoiselle et se sentit rougir. Il se sentait vraiment trop bête et s’il continuait de frotter sa nuque ainsi, il allait finir par la rendre aussi rouge que son visage.
- Je t’accompagne quand même à l’infirmerie... Au cas où... Enfin, si ça ne te dérange pas...
Si elle refusait, il ne savait pas ce qu’il ferait. C’était contraire à tous ses principes de laisser seule une demoiselle en détresse. Enfin, même si elle avait continué à être un mec, il l’aurait accompagné quand même hein !
- Et euh, tu crois que... enfin ça va ?
La maladresse de Sylvester le rendait adorable. Crétin, mais adorable, vous ne trouvez pas ?
« où la situation est plus grave qu'elle en a l'air »
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Si. Si tu voulais qu’il te lâche. Il allait te lâcher. C’était ton poignet qui était –probablement- fracturé ! Pas ta cheville ou ton péroné. Tu pouvais marcher comme une grande non mais oh ! Ce qui n’était pas convenable pour toi Luna, c’était d’être porté comme une princesse par une autre personne que Percy ! Ou ton père. Parce que tu restais la petite princesse de ton père tout de même.
Tu ne compris pas trop pourquoi il buta sur ton prénom. « Luna » c’était pas spécialement original ou folklorique. Pas comme Gretchen. Tu haussais les sourcils, un peu agacée par tout ce manège.
« Bah oui, Luna. »
Une des mains te lâcha et tes pieds rejoignirent le sol. Enfin ! Bon, il te tenait toujours, et avec l’état de ton bras tu aurais du mal à le forcer à te lâcher. Sans parler de ta force naturelle qui était à peu près aussi existante que le son dans l’espace.
Tu voulais bien le croire, qu’il avait paniqué. Un peu comme tes parents quand tu t’abîmais quelque chose. Sauf que tes parents savaient pour ta maladie, et pas lui. Tu pris les excuses comme elles venaient, quoi qu’avec un peu d’agacement. Au moins, ça te faisait un peu oublier la douleur dans ton poignet.
Pour autant, ce Sylvester ne voulait pas te lâcher, dans tous les sens du terme. Qu’il tienne à ce point à t’accompagner jusqu’à l’infirmerie, , okay. Mais qu’il arrête de te tenir contre lui comme ça. C’était gênant. Et inapproprié.
« Oui oui, d’accord. Si tu veux, mais lâche-moi maintenant s’il te plait. Je me suis fait mal au poignet, pas aux jambes ! »
Peut-être qu’à force d’insister, il allait finir par comprendre.
Tu soufflas pas le nez, Luna, à sa question, alors que tu te dégageais enfin de sa prise et te mettais à marcher vers la sortie du stade.
« Oui, ça va. Enfin, ça fait mal, mais j’ai l’habitude donc t’inquiètes pas. Ca va aller ! »
Sylvester était rouge comme une tomate. Prendre une fille pour un mec c'était assez... stupide. Et pas très classe. Pas classe du tout. Les princesses étaient dignes d'être vénérées alors les prendre pour des mecs c'était pas cool ! Ouais, le métisse mettait la gente féminine sur un piédestal. Il avait trois sœurs après tout et en avait eu quatre avant... avant que la quatrième ne disparaisse. Sortez les mouchoirs. Bref, le jeune homme s'en voulait à mort de s'être trompé. Surtout que Luna c'était un très joli prénom !
- Haha, oui d'accord. Luna c'est très bien.
Il devait vraiment avoir l'air idiot, mais au moins elle ne semblait pas avoir compris qu'il s'était trompé sur son sexe. C'était déjà ça. Il aurait eu envie de s'enterrer dans le sol si c'était arrivé. En tout cas, elle avait l'air agacée et il s'en voulait car c'était sa faute. Mais il avait voulu bien faire ! C'était pas sa faute s'il était un peu simple d'esprit, on pouvait pas être parfait partout ! Et puis elle avait beau prendre ça vachement bien pour une fille - pas taper, mesdemoiselles - ça devait quand même faire vachement mal un poignet cassé !
Il la lâcha néanmoins de bonne grâce puisqu'elle semblait insister. Il n'avait pas très envie de se prendre une gifle ou un truc comme ça, on ne savait jamais avec les filles et non il n'est pas sexiste, mais quand même la gente féminine n'était pas toujours compréhensible pour lui. Comme si elles étaient une espèce à part. Enfin, lui aussi était un drôle d'animal alors il valait mieux qu'il se taise. Et oh il adorait les filles d'accord, il en avait trois à la maison et s'entendait très bien avec deux d'entre elles ! La troisième... Il vaut mieux ne pas parler de la troisième, ça vaut mieux. Malthida était un cas à part. Sa jumelle lui manquait énormément, mais il ne savait plus quoi faire pour effacer le fossé qui s'était creusé entre eux depuis la mort de leur sœur.
- Excuse-moi. Je voulais pas t'embêter.
Il se frotta la tête avec gêne avant de la suivre en instaurant une distance de sécurité. Si ça ne tenait qu'à lui il l'aurait collée pour être sûr de la rattraper si elle s'évanouissait ou s'effondrait de douleur - on ne savait jamais ! - mais elle avait l'air de mauvaise humeur alors peut-être qu'il valait mieux ne pas tenter le diable. L'habitude ? La pauvre. Lui avait l'habitude de se retrouver à l'infirmerie, mais c'était parce qu'il se bagarrait de son plein gré et non parce qu'il tombait. Il ne tombait jamais d'ailleurs, il était une bête en sport.
- C'est pas drôle d'avoir l'habitude d'avoir mal.
Philosophie de vie par Sylvester. Il ne brillait pas par son intelligence aujourd'hui... Peut-être que c'était à cause de la chaleur. Ou peut-être parce qu'il avait mal dormi cette nuit à cause des cauchemars qui avaient envahi son sommeil. Ou peut-être était-ce tout simplement parce qu'il était lui-même. Ouais... On est d'accord, pas très rassurant comme dernière option.
Le jeune homme se demanda qui serait à l'infirmerie quand ils arriveraient. Le médecin et les infirmiers devaient en avoir marre de le voir et il n'avait pas très envie de se faire sermonner alors que pour une fois il n'avait rien fait ! Au contraire, il se montrait même responsable en escortant sa camarade. Alors il allait faire en sorte de parler très vite pour leur faire comprendre qu'il n'était qu'un accompagnateur et qu'il n'avait pas besoin de leurs soins car il ne s'était pas bagarré aujourd'hui. Très vite avant de se faire engueuler, ouais c'était une bonne idée.
- Moi aussi j'ai l'habitude de l'infirmerie tu sais. Enfin, c'est pas pour les mêmes raisons... T'es dans quel groupe au fait ?
Ouais parce qu'avant de balancer qu'il était un outrageous et risquer de lui faire peur - ils avaient mauvaise réputation apparemment, il ne comprenait pas vraiment pourquoi, certes ils étaient bizarres, mais pas méchants... enfin pas tous - il valait mieux se renseigner un peu sur elle. Elle n'avait pas trop le look d'une outrageous, dommage, enfin il était bien placé pour savoir qu'il fallait pas juger sur les apparences. Comment pourrait-on savoir qu'il était aussi bizarre quand on ne le connaissait pas ? Enfin, c'était les autres qui disaient qu'il était bizarre, lui se trouvait parfaitement normal ! ... Ou pas.
« où la situation est plus grave qu'elle en a l'air »
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Dans le fond on n’allait pas se mentir Luna, mais tu trouvais ce Sylvester un peu étrange. Pas vraiment mauvais étrange, mais étrange quand même. Mais bon, comme il avait enfin accepté de te reposer par terre, tu voulais bien faire avec. Tu te tournais à moitié vers lui en marchant, autant que tu pouvais sans te faire trop mal, et fit une moue indéfinissable.
« J’y vais souvent à cause de ma maladie en fait. J’ai les os fragiles. »
Ô doux euphémisme. Fragile, ce n’était pas un mot assez fort. Après tout le surnom de ta maladie, « os de verre », était très explicite. Une simple bosse chez toi pouvait devenir un danger mortel. Après une chute comme celle que tu avais faite, n’importe qui aurait juste eut les mains un peu écorchées. Toi, ton os s’était fracturé. Peut-être même cassé ?
Sylvester ne savait pas vraiment où se mettre. Il se sentait ridicule de paniquer ainsi, mais il n'y pouvait rien. Il était comme ça et ce n'était pas si facile de changer. Il en savait quelque chose, il avait déjà essayé, mais cela n'avait pas vraiment porté ses fruits...
Il savait bien qu'il était bizarre et qu'il exagérait beaucoup trop les choses à chaque fois, mais il n'y pouvait vraiment rien s'il avait le sens du dramatique ! Ah si seulement il avait une baguette magique, ce serait plus simple que de changer sa personnalité et sa façon de voir les choses... très personnelle.
Le métisse ne put retenir une grimace. Les os fragiles ? Waouh, ça avait l'air... euh... embêtant ? Non pas assez fort... Emmer... oups, il pouvait imaginer les sourcils de grande soeur Leyna se hausser avec sévérité.
Enfin, vous avez compris. Pour un casse-cou cela ressemblait à la fin du monde.
- Mais c'est affreux ! Enfin je veux dire... ça doit être gênant au quotidien.
Ouais, le tact c'était pas vraiment ça, mais au moins il faisait des efforts. Remarquez-le s'il vous plaît. Le brun se frotta les cheveux avec un air embarrassé avant de retenir un soupir de soulagement devant le changement de sujet bienvenu.
- Ooh une Galilée ! Tu dois être super intelligente alors ! T'es une scientifique du coup ? Trop la classe !
Ouais, à côté d'un Outrageous en tout cas. Enfin, Sylvester était pas trop mauvais en cours, quand il faisait des efforts et qu'il ne se laissait pas distraire. Parce que disons le franchement il y avait des trucs plus passionnants que l'école quand même... Enfin, au moins il était plutôt bon en maths ! Les langues par contre... Trop de règles à suivre brr.
- Je crois que t'es ma première amie chez les Galilée. Enfin, si tu veux bien d'un idiot comme moi...
De nouveau, le fan de sport se frotta la tête en rougissant un peu. Ouais, fallait pas le croire plus stupide et aveugle qu'il était. Il savait bien qu'il n'était pas vraiment intelligent, qu'il faisait des bêtises, qu'il était insupportable parfois, beaucoup trop énergique, trop chahuteur, trop... Enfin, il avait conscience de ses défauts quoi.
- En tout cas, t'as l'air sympa, Luna.
Ouais, toujours cette adorable et innocente franchise. On ne se refait pas que voulez-vous.
« où la situation est plus grave qu'elle en a l'air »
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L’exclamation de Sylvester était en parfait accord avec ce que tu pensais, Luna. Oui, c’était affreux. Affreux parce que le moindre choc prenait des proportions considérable, en témoignait ton bras. Là où quelqu’un d’autre aurait juste eut une éraflure, peut-être un bleu, toi tu te retrouvais avec au moins un os fracturé. Affreux parce que tu étais née après Soley, ta grande-sœur mort-née à cause de cette même maladie. Affreux parce que cette malheureuse circonstance avait conditionné tes parents à être beaucoup trop protecteurs avec toi et à t’isoler de tout ce qui faisait les joies d’un enfant. Soupir à fendre l’âme.
« Tu n’imagines même pas… »
Scientifique, oui. C’était le bon mot. Ta passion à toi, c’était la biologie animale. Les insectes, précisément. Tu hochais la tête avec enthousiasme en guise de réponse. Puis le regardait à nouveau avec curiosité. Amis ? Déjà ? Tu réfléchissais à ça. C’était un peu triste à dire, mais tes amitiés duraient rarement très longtemps. Soit elles disparaissaient, soit elles devenaient des connaissances. La faute à ta maladie, encore, qui pouvait se révéler handicapante par moment. La faute sans doute aussi en partie à ton caractère d’enfant gâtée, insupportable quand tu t’y mettais.
« Ca… » Hésitation. « Ca ne me dérange pas. T’as l’air bien aussi. Enfin, quand tu t’emballes pas. »
Petite précision tout de même.
Vous quittiez enfin le stade, passant au passage près d’un buisson particulièrement bourdonnant. Des abeilles. Tu ne les avais pas vus en arrivant. Dommage, tu aurais passé ton temps à les observer si tu avais su. Ca t’aurait évité de te blesser. Tu reviendras peut-être plus tard ?
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