Sa nervosité grandissait. Depuis qu’elle avait appris la nouvelle, Cassie n’était plus sereine. Dire qu’une agression physique de la part de Queen en était la cause… Qui aurait pu croire que celle que l’on croyait jusqu’alors virtuelle, un avatar utilisé de façon plus ou moins réfléchie, était en réalité capable de se mouvoir ? Et qui plus est au sein du palais !

Enfin, avant tout, il fallait s’assurer que Queen était bel et bien la coupable. Après tout, cet aveu sur son blog était peut-être faux. Cette situation la mettait peut-être plus en lumière et lui était profitable. Et dans ce cas, qui se cachait sous son masque ? Qui prenait la liberté d’assumer un acte aussi odieux ? Face à ces possibilités infinies, Cassie ne savait plus où donner de la tête. Mais il y a bien une chose dont elle se sentait capable.

Elle prit une grande inspiration, puis toqua.

“Salut, c’est moi…”

En le voyant réveillé, les larmes se mirent à perler au coin de ses yeux. Dieu merci, il allait bien ! Elle se précipita à son chevet et eut un instant d’hésitation, avant de le prendre délicatement dans ses bras.

“Oh, je suis si soulagée que tu ailles bien !” s’exclama-t-elle en essuyant une larmichette. “Comment t’en sors-tu ? Tu dois rester ici pour combien de temps ?”

Le regard brillant posé sur son ami, Cassie s’assit sur le bord du lit. Il dégageait une telle fragilité… Quelle frayeur.

Quand j’ai appris ce qui était arrivé à mon Bro, j’me suis senti con. Et sous le choc aussi ! Franchement, cette pétasse de Queen, elle ne paie rien pour attendre ! J’vais la retrouver et la dézinguer aussi sec ! On. Ne. Touche. Pas. A. Mon. Bro. C’est tout. C’est pourtant pas compliqué, si ?

Je me suis ramené à l’hosto’ un peu à l’improviste. Parce que j’aime bien lui faire des surprises. Et aussi parce que j’ai oublié de lui envoyer un message. Et que je trouve plus mon foutu portable dans ma chambre. Je sais sérieusement pas où j’ai fiche cet engin, cette fois. J’étais persuadé de l’avoir dans la commode ! Chiant. Quoi que… J’ai pas vérifié sous Rambo. Il est foutu de s’être lové dessus comme la dernière fois. Faudra que je check tout ça en revenant.

Arrivé à l’accueil de l’hôpital, je demande la chambre avec le nom, tout ça. La nenette me demande quel est mon lien avec le patient, bah je réponds que c’est mon Bro. Elle me laisse passer. Ca a dû la convaincre, j’imagine ? Mais bref ! Une fois devant la porte, je n’attends pas vraiment pour entrer en quasi-fanfare. « Broooooo ! Salut salut ! Alors, ça drague les escaliers maint- » Ah. Il est pas tout seul. Je le regarde. Puis elle. Puis lui. Puis elle. J’me sens un peu mal à l’aise. « Oops, j’interromps un truc sympa ? J’peux te laisser avec ta meuf et repasser plus tard s’tuveux. » Pas comme si l’hôpital était à mille kilomètres non plus, un tour du quartier et ce serait fait.

Tout en se recoiffant distraitement, trop heureuse pour râler après le blond, Cassie poussa un soupir rassuré lorsque’il expliqua qu’il sortirait bientôt. Ca ne pouvait pas être trop grave, dans ce cas ! Un grand sourire étira les lèvres de la Real Fake. Elle avait à coeur d’aider son ami à repartir du bon pied.

“Je sais ! Pourquoi ne pas faire un pique-nique ici, demain midi ? La nourriture de l’hôpital laisse un peu à désirer, il paraît. Ca pourrait te faire du bien, non ?”

Inutile de préciser qu’elle ne cuisinerait pas elle-même. Niko finirait par l’appeller Madame Calamité, sinon.
C’est alors que la porte s’ouvre brusquement. Cassie écarquille les yeux, surprise de voir cette tête rousse surgir dans la chambre. Son regard s’adoucit bien vite ; la demoiselle n’oublie jamais ceux qui font preuve de gentillesse à son égard.

“Alexandre, bonjour ! Tu ne déranges pas du tout, ne t’inquiète pas.” déclare-t-elle, avant de se tourner vers Niko, tout sourire. Cette histoire de couple, c’était de l’histoire ancienne. Parlons plutôt d’Alexandre et Niko. Alors comme ça, ils étaient amis ? Quelle bonne surprise !

“Je suis désolé mais… Qui êtes-vous ?”

Oh. L’ambiance retombe. Cassie n’est pas assez idiote pour ne pas remarquer comme une atmosphère gênée. Bien. La bienséance impose, lorsque de tels cas se présentent, de se retirer afin de laisser les deux partis s’expliquer si besoin. Et Cassie tâchait d’être une jeune fille polie.

“Bon, les amis, je vais vous laisser, vous devez avoir beaucoup à vous dire. Alexandre, ce fut un plaisir de te revoir !” s’exclama-t-elle avant de se tourner vers le blond. “Niko.” le salua-t-elle en déposant un baiser léger sur ses cheveux en guise d’au-revoir. Elle leur adressa un petit sourire contrit avant de refermer la porte, doucement. Elle se mordait les joues, adossée contre le mur de l’hôpital, angoissée à l’idée que son dernier geste soit déplacé. Par curiosité, elle se ressaisit bien vite ; qu’allaient-ils pouvoir se dire ?

Ahah. L’humour de Bro’, toujours le même. PAS DRÔLE. Surtout dans un cas pareil. Putain mais genre moi je me fais un sang d’encre et lui il fait genre il me connait pas. Gros débile va ! J’lui ferais payer ça, j’m’en fiche. Je laisserais Rambo se balader dans sa chambre et il laissera des poils partout. NAH. Quand j’ai dit que j’allais me venger. Héhéhé, je serais terrible, parole d’O’Marsch ! Dans la famille, on se laisse pas faire. Ce serait nouveau. Mais bon, je m’égare.

Je laisse la nana rosée partir, peut-être que c’était sa meuf ou pas, j’en sais rien, ça me regarde pas. Bon, ça me dérange un peu de penser ça, même si je saurais pas trop dire pourquoi. Mais y’a plus urgent, maintenant. Mine de rien, ça va, il a pas l’air d’aller trop mal.

« Super drôle, bro’ ! Ahah, j’suis mort de rire… Ou pas. » Inspiration, expiration, je me rapproche du lit. « Bon, ça va tu as pas eu l’air d’avoir trop de casse dans cette chute. C’est le plus important. Tu sors quand ? » Que je sache quand je pourrais revenir le voir et/ou le chercher, aussi. Je sais qu’il le ferait sans hésiter pour moi alors la moindre des choses, c’est que je sois disponible pour lui filer un coup de main aussi.
Et puis je me sens coupable de pas avoir été là, un peu.

Mademoiselle Alexandre. Je phase un peu, là. Beaucoup même. Mais. Je. Il ? Mais quoi ? MAIS. FUCKING. QUOI ? Qu’est-ce qu’il raconte, au juste ? C’est quoi ce bordel ?! J’ai beau essayer de percer son jeu d’acteur, je vois pas de faille. Ok je suis pas le plus calé à ce jeu-là non plus mais… Je saurais pas l’expliquer. Il ment pas. Juré il ment pas. Ça se voit sur sa gueule. Je sens mon cœur qui bat, genre, à dix mille à l’heure. Mes pensées s’embrouillent. Je déteste ça bordel. Je sais plus quoi dire, quoi penser non plus.
Merde, mes mains tremblent.

« Je… » C’est putain de pas drôle. Je voudrais lui hurler que c’est qu’un abruti de faire des blagues comme ça. Mais j’y arrive pas. Il m’a appelé MADEMOISELLE. Puis Alexandre. ALEX-FUCKING-SANDRE. MAIS D’OU CA SORT, CA ? Je peux pas tenir. Ouai bon, désolé. Au pire s’il déconne, il rampera pour s’excuser mais j’y crois moyen. Il a juste perdu la mémoire. Mais il a pas oublié l’autre rose là.

Il m’a juste oublié moi.

Pourquoi ça fait si mal que ça bordel ? C’est tellement chiant. J’aime pas ça, ce genre de situation. Putain. J’ai même pas trop le temps de capter ce qu’il se passe que je suis déjà dehors. Je suis parti. C’est tout. J’ai juste envie d’être seul. Je vais aller m’enfermer avec Rambo. Ouai, voilà, au moins un individu qui fera pas comme si j’existe pas. Si j’ai de la chance.