Je ne sais pas de qui je suis le plus admiratif. Roméo pour s’enfoncer toujours plus profondément dans la connerie ; ou Indra pour avoir su gérer mon abruti de clébard sans l’assassiner sur place. Bon en même temps je l’aurais mal pris. Mais là n’est pas la question. Pas vraiment. Il a réussi à se défaire de l’emprise de mon husky, autant reprendre notre conversation d’avant.

Enfin, pas vraiment. Parce qu’il me rappelle qu’effectivement, il est grand temps que les pizzas arrivent.

« Ah, oui je vais regard- »

Pas le temps de finir ma phrase que mon portable sonne. Ouah, le timing de ouf. Je décroche. Le type me dit être juste à l’entrée du palais. Parfait. Je m’étire les bras un instant et me retourne vers Indra.

« Il est juste aux grilles, bouges pas je reviens ! »

Aussitôt dit, aussitôt fait. Roméo ne semble pas décidé à bouger pour venir avec moi. Espèce de lâcheur, và ! Mais peu importe. Je rejoins le point de rendez-vous avec le livreur, prends les pizzas et retourne avec tout ça vers notre coin de calme. Ceci fait, je lui tends sa pizza et m’installe à ses côtés.

« Bon eh bah, bon appétit ! »

C’est vrai que je commençais sérieusement à avoir faim, moi aussi.

Oh putain, je ne m’étais pas attendu à ça. C’est ultra fort, ces épices ! Bon, rien d’insurmontable non plus, il ne faut pas exagérer. Mais j’avoue que, pour moi qui ne suis pas habitué, ça me tire un peu les larmes. J’ouvre une bière ans la foulée, histoire d’étancher cette soif si particulière. Ma gorge apprécie, bizarrement. Mais c’est vrai qu’Indra aime bien tout ce qui est relevé. Cela ne m’étonne qu’à moitié.
Je lui souris malgré tout.

« C’est super fort, mais pas désagréable. Il faut juste que je me ré-habitue. La dernière fois que j’ai mangé quelque chose d’aussi épicé, ça commence à remonter en fait ! »

Je lui tends une bière, histoire de ne pas continuer à trinquer tout seul. Et là, réflexe de fou, je remonte mon bras juste avant que Roméo ne vienne croquer dans la part que je n’avais pas encore fini, dans ma main.

« Certainement pas, Rom’ ! Déjà que la pizza ce n’est pas recommandée pour les chiens, mais celle-là, avec toutes les épices, je suis presque sûr que tu n’apprécieras pas du tout. »

Pas vraiment envie de l’emmener en urgence chez le véto du coin ou attendre la soirée qu’il se purge tout seul, merci bien.

Oublier d’aller promener Roméo.
Ce serait crédible comme excuse si, en soit, Roméo n’était pas un foutu réveil ambulant et au taquet dès qu’il est question que je le sorte.

« Absolument pas, au contraire ! Il me rappelle suffisamment quand est-ce que je dois le promener pour que je ne m’essaie pas à oublier ce détail, penses-tu. »

Je le vois attaquer le carton de la pizza. Mais quel idiot. Heureusement il se fatigue vite tout seul. Mais j’ai une idée pour l’épuiser encore plus. J’agite sa balle devant lui, captant encore une fois son attention. Parfait. Et je la lance. Enfin, je fais genre je la lance mais en fait, elle est dans mon dos. Il est parti à toute allure dans le champ, il va chercher un moment je pense. Ce qui fait un moment de tranquillité, donc. Parfait.
Je prends ma bière et tâche de la finir, maintenant que c’est un peu plus calme.

« Ah, enfin un peu de paix, ça fait du bien ! »

Je ris.

« Ça fait du bien d’avoir un peu de tranquillité, juste toi et moi. Depuis le temps qu’on devait se faire un truc tous les deux… »

C’est vrai que ça commence à dater maintenant. Mais bon, mieux vaut tard que jamais, non ?